Sandrine Gestin
La fée de l'ile de Loc'h
L'histoire,qui débute à Lannilis dans le Nord-Finistère, est celle de Houarn Pogamm et de Bellah Postik, deux jeunes amoureux promis depuis longue date. Malheureusement, la mort de leurs parents les avaient plongés dans le dénuement, et chacun, tout en travaillant, n'arrivait pas à mettre suffisamment d'argent de côté pour acheter une petite vache et un cochon maigre et pouvoir ainsi se marier.
Las d'attendre, Houarn décida de prendre la route en quête d'une meilleure fortune. Bellah, inquiète de le voir ainsi s'en aller, lui confia deux des trois reliques qu'elle tenait pour seul héritage.
La première, la clochette de Saint Kadélok, avait pour objet d'avertir les proches et amis que vous couriez un grand danger.
La seconde, le couteau de Saint Corentin, annulait les maléfices des sorciers dès qu'il entrait en contact avec leurs victimes.
La troisième relique, le bâton de Saint Vouga, elle le garda pour elle, car il possédait le pouvoir de vous transporter où vous vouliez.
Arrivant dans le Sud-Finistère, Houarn entendit parler de la Groac'h de l'étang du Loc'h qui se trouvait sur la plus grande île des Glénans. La Groac'h, ou la mauvaise fée, était, disait-on, d'une richesse incommensurable. Nombreux étaient les jeunes gens qui avaient tenté de s'emparer de son trésor, mais personne n'en était jamais revenu.
Imprudents jeunes hommes !
N'écoutant guère les conseils de prudence des gens de la région, Houarn s'embarqua pour l'île du Loc'h, bien décidé à tenter
sa chance. Un petit bateau semblait l'attendre sur l'étang. Mais dès qu'il eut mis les deux pieds dedans, ce dernier plongea au plus profond de l'eau. Houarn se retrouva ainsi à l'entrée d'un
merveilleux palais de coquillages, où l'on accédait par un bel escalier de cristal. La fée l'ensorcela aussitôt par sa beauté et ses vins savoureux. Elle lui offrit de partager ses richesses s'il
acceptait de la prendre pour épouse.
Houarn, sous le charme, accepta, et la fée le métamorphosa en grenouille.
Bellah entendit aussitôt tinter la fameuse clochette de Saint Kadélok. Son bâton magique la conduisit alors auprès du véritable époux de la Groac'h, lui aussi condamné à un triste sort, qui lui donna le secret pour délivrer Houarn et tous les autres.
Déguisée en séduisant jeune homme, elle se rendit donc sur l'île et, déjouant le piège de la sorcière, libéra les malheureux captifs après leur avoir rendu forme humaine, avec le couteau de Saint Corentin.
Houarn et Bellah purent ensuite faire leur choix parmi le trésor et rentrèrent dans leur pays de Lannilis, fortune faite, et prêts à se marier.
D'après un texte d'Emile Souvestre (avocat, journaliste et écrivain breton
1806-1854)