Une petite collection que je n'avais pas encore montré et qui a débuté quand une de mes filles m'a ramené un dé d'un voyage
scolaire en Angleterre. Depuis, elle m'en offre de temps en temps, et j'en ai une douzaine, que vous voyez sur la photo ci-dessous, avec mes piluliers
Je commence par le dernier que j'ai reçu, pour la fête des mères il y a quinze jours.
les ailes tournent
au dos les armoiries de Quimper, ma ville natale
" D'azur au bélier passant d'argent accorné et onglé d'or, au chef d'hermine."
Avec un conte breton pour l'accompagner : Le moulin du diable
Dans un petit hameau proche de Guérande, vivait un paysan qui s'appelait Yves Kerbic. Il était très pauvre, comme tous les paysans des alentours.
Durant la journée, il devait travailler les champs du seigneur, et, lorsque le soir tombait, il pouvait ensemencer son propre petit lopin de terre, où il faisait pousser du blé.
Malheureusement, le hameau n'avait pas de moulin et les paysans, déjà si pauvres, devaient encore payer plusieurs sacs de blé pour avoir le droit de faire moudre leur grain au moulin du seigneur. Ils en revenaient avec si peu de farine que jamais ils n'en avaient assez pour faire du pain toute l'année. Immanquablement, quand arrivait le mois de mars, les huches étaient vides et la famine s'installait.
Cette année-là, en mars précisément, Yves Kerbic était assis sur le pas de la porte, lorsque sa femme, Marie, lui dit :
-"Je mets pour le souper le dernier croûton de pain qui nous reste. Si au moins nous n'avions pas à payer au seigneur pour moudre le grain au moulin, nous pourrions avoir du pain toute l'année !"
-"C'est vrai, dit Yves, il nous faudrait un moulin. Malheureusement, nous travaillons toute la journée aux champs, comment trouver le temps d'en construire un ?"
A peine eût-il dit ces mots qu'un serpent sortit de terre juste à ses pieds.
-"Je veux bien, moi, te construire un moulin, siffla-t-il, mais..."
-"Mais quoi," demanda Yves.
-"Mais en échange, tu me donnes quelque chose."
-"Que veux-tu ?"
-"Oh ! pas grand chose...tu ne t'apercevras même pas que tu ne l'as plus...ça ne coûte rien..."
-"Mais enfin, fit Yves en s'énervant, de quoi parles-tu ?"
-"De ton âme."
-"Mon âme ?"
Marie s'approcha en criant :
-"Ne fais pas ça, Yves, c'est le diable ! Ne vends pas ton âme au diable!"
Mais Yves n'écoutait pas sa femme.
-"Hum... fit-il en se grattant le menton... Tu dis que tu me construiras un moulin ?"
-"C'est cela même. Un moulin magnifique, tout en granit, sur la butte que tu vois là."
-"C'est bon, dit Yves, construis le moulin et mon âme est à toi. Je signerai le pacte au moment où tu poseras la dernière pierre."
Marie se mit à pleurer, mais il n'y avait plus rien à faire.
Le lendemain, Yves fut réveillé par les cris de Marie :
-"Yves ! Oh Yves ! Une rangée de pierres est déja posée sur la butte de Crémeur. Je t'en prie, annule ton pacte avec le diable !"
-"Calme-toi, répondit Yves, le moulin n'est pas fini."
-"Yves ! Oh Yves ! Deux rangées de pierres sont déjà posées sur la butte de Crémeur. Je t'en supplie, annule ton pacte avec le diable !"
-"Calme-toi, Marie, le moulin n'est pas fini."
-"Yves ! oh yves ! Il ne manque plus qu'une pierre !"
-"Calme-toi, Marie, c'est une pierre qui ne sera pas posée."
Yves se précipita vers le moulin, et avant que le diable n'ait eu le temps de poser sa dernière pierre, il mit à la place une statue de la Vierge.
Le diable poussa un hurlement si épouvantable que toute la contrée en fut réveillée. puis il s'évanouit en fumée et disparut dans la terre.
Et c'est ainsi que Yves Kerbic eut son moulin...et garda son âme !
Contes traditionnels de Bretagne
Evelyne Brisou-Pellen (romancière française, née en 1947)